Selon une dépêche de la presse présidentielle, le mini-sommet de Luanda en Angola, entre les présidents de la République démocratique du Congo et du Rwanda, sous la médiation de leur homologue angolais, João Lourenço, s’est terminé hier mercredi 6 juillet par un accord pour désamorcer le conflit entre les deux voisins. « Il faut aller de l’avant pour sortir de cette crise et restaurer la confiance entre les dirigeants politiques, comme une façon de voir l’avenir de la RDC et du Rwanda, et en particulier de la région en général », a déclaré le Président Félix Tshisekedi après la fin de la rencontre tripartite de Luanda.
La version de Kigali du sommet de Luanda, reprise par l’agence rwandaise de presse ne dit pas tout à fait la même chose : » Le sommet tripartite de Luanda sur la situation sécuritaire dans l’est de la RDC s’est conclu par une feuille de route pour désamorcer les hostilités, qui comprend la résolution de la question des FDLR tandis que la question du M23 doit être traitée au niveau national dans le cadre du processus de Nairobi. »
Cette lecture du Rwanda de la tripartite de Luanda a fait tiquer bien d’analystes rd congolais. Pour ces derniers, la version rwandaise accrédite la thèse selon laquelle Kinshasa serait de mèche avec les FDLR alors qu’il est question de Bunagana occupé par le M23 dont les éléments sont traités de terroristes par la RDC.
Mais aussi invraisemblable que cela puisse paraitre, le Rwanda présente sa propre version qui veut faire de la question du M23 un conflit purement congolo-congolais. Au finish c’est une façon pour Kigali de chercher à réhabiliter le M23 par d’autres moyens et donc réfuter la thèse de l’agression que soutient la RDC. Question : la RDC va-t-elle continuer à négocier sur cette base ?
Arrêter de négocier et obtenir de Kigali qu’il joue franc jeu
Pour un même sommet, tenu le même jour, il y a deux versions diamétralement opposées. Kigali devrait avoir la même version que Kinshasa. Que vient faire la question des FDLR à ce sommet ? Nombre d’observateurs estiment qu’au lieu de continuer à négocier, Kinshasa doit arrêter et obtenir de Kigali qu’il joue franc jeu.
On rappelle qu’il y a peu, intervenant au Conseil de sécurité, le Représentant congolais a brandi la liste- dressée par l’ancien patron de l’ANR, Kalev Mutondo- de combattants du mouvement terroriste non éligibles à l’intégration au sein des FARDC. Le mouvement terroriste estampillé M23 a tout d’un revenant. En 2013, ce groupe armé pro Rwanda avait été défait par les FARDC. Nombre de ses officiers déclarés non éligibles à l’intégration au sein de l’Armée congolaise. Voilà que Kigali cherche à le recycler.
La désescalade se fera progressivement selon la feuille de route dite « de Luanda« , élaborée dans le but de rétablir la confiance entre la RDC et le Rwanda. Les deux pays ont convenu de relancer la commission mixte RDC-Rwanda, qui ne s’est pas réunie depuis plusieurs années. Cette commission tiendra sa première réunion le 12 juillet à Luanda, en Angola.
« Je suis heureux d’annoncer que nous avons fait des progrès » , a déclaré le président Joao Lourenço après les pourparlers, « car nous nous sommes mis d’accord sur un cessez-le-feu » . La feuille de route trace la voie vers une normalisation des relations diplomatiques entre Kinshasa et Kigali. Il prévoit également un arrêt immédiat des hostilités entre les deux États et le retrait immédiat et inconditionnel des forces rebelles du M23 de leurs positions dans la zone frontalière de la RDC.
Par ailleurs, la feuille de route prévoit le retour des réfugiés dans leur pays d’origine, et précise que toute exploitation des ressources naturelles de la région doit se faire dans le strict respect de la souveraineté de l’Etat.
Le président João Lourenço a annoncé que les parties avaient également décidé de créer un mécanisme d’observation ad hoc qui sera dirigé par un officier de l’armée angolaise. Il a ajouté que ce mécanisme sera en vigueur simultanément avec l’instrument existant de la Conférence internationale sur la région des Grands Lacs (CIRGL).
Le président du Rwanda, Paul Kagame, s’est dit satisfait des résultats du sommet de Luanda, compte tenu des principes fondateurs établis, grâce à la médiation du président João Lourenço.
RENDEZ-VOUS LE 12 JUILLET À LUANDA
Autre point inscrit dans la feuille de route adoptée hier à Luanda, figure l’épineuse question de groupes rebelles oeuvrant dans l’Est de la RDC. Si Félix Tshisekedi accuse Paul Kagame de soutenir le M23, Kigali, à son tour, soutient que Kinshasa entretient les FDLR, rebelles opposants au régime Kagame réfugiés en terre congolaise depuis 1994.
LE M23 APPELÉ À SE RETIRER DE SES POSITIONS
Les trois chefs d’État réunis hier dans le cadre de la tripartite sur la sécurité dans l’Est de la RDC à Luanda ont été intransigeants vis-à-vis des rebelles du M23. Dans la feuille de route arrêtée, affirme la Présidence de la RDC, Félix Tshisekedi et Paul Kagame sous la médiation de Joao Lourenço ont exigé aussi « le retrait immédiat et sans condition du M23 de ses positions en RDC » pour permettre la suite du processus de Nairobi.
La même feuille de route de la tripartite stipule une volonté de normalisation des relations diplomatiques entre Kinshasa et Kigali et ordonne le retour des réfugiés rwandais dans leur pays.
Cependant, sur le plan pratique, Félix Tshisekedi, Paul Kagame et Joao Lourenço ont promis de se retrouver autour d’une table et à travers une commission instituée pour le suivi de ladite feuille de route. L’Angola, la RDC et le Rwanda se sont donné ainsi rendez-vous pour le 12 juillet prochain à Luanda en vue d’arrêter les modalités pratiques de la concrétisation de cette feuille de route.
« ATMOSPHÈRE TENDUE ENTRE LA RDC ET LE RWANDA ÉTAIT INUTILE »
Au sortir de la réunion avec ses collègues angolais et rwandais à Luanda, Félix Tshisekedi s’est exprimé devant la presse. Le Président de la RDC a estimé à cette occasion que « l’atmosphère tendue entre la RDC et le Rwanda et les deux peuples était inutile ».
Rachidi MABANDU et Didier KEBONGO
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