Tout le débat ce jeudi, devant la chambre des mises en accusation de Bruxelles, porte sur la résidence en Belgique du président du sénat congolais.
La chambre des mises en accusation de Bruxelles a entendu ce jeudi 5 décembre les parties concernées par le dossier “Thambwe Mwamba”, du nom du nouveau président du Sénat de la République démocratique du Congo (RDC) qui doit faire face en Belgique à une plainte pour crime de droit humanitaire mais aussi pour faux, corruption et blanchiment.
Le dossier le plus lourd concerne la responsabilité de M. Thambwe Mwamba dans le tir d’un missile contre un avion transportant des civils dans le Maniema, en 1998, en République démocratique du Congo. M. Thambwe Mwamba était alors un des responsables de Rassemblement Congolais pour la Démocratie (RCD), un mouvement rebelle, actif dans l’est de la RDC, opposé à la prise de pouvoir à Kinshasa par Laurent-Désiré Kabila.
Ce jour-là, Alexis Thambwe Mwamba n’a pas hésité à revendiquer cet attentat sur des chaînes de radio. Mais pour Maître Laurent Kennes, l’avocat de M. Thambwe, interviewé en septembre dernier lorsque son client avait accepté d’être entendu longuement par le juge d’instruction bruxellois Michel Claise, “mon client n’a participé à aucune décision de tirer sur un avion, certainement pas contre un avion civil”.
Pour Me Kennes, qui plus est, la Belgique n’est pas compétente pour ce dossier, ni pour les autres charges car son client n’a aucun lien avec la Belgique. “Le dossier doit être définitivement oublié”, expliquait-il.
Le parquet fédéral donne en partie raison à Me Kennes. Pour le parquet fédéral, Monsieur Thambwe ne peut être poursuivi pour ce crime de droit humanitaire car la plainte déposée est basée sur l’article 6 du Titre préliminaire du Code d’instruction criminelle qui nécessite la résidence principale de l’auteur présumé sur le territoire belge. Or, pour le parquet fédéral, ce n’est pas le cas. Le président du Sénat, n°2 dans l’ordre protocolaire de l’État congolais et ancien ministre de la Justice, ne peut avoir sa résidence en Belgique. Aux oubliettes donc le dossier le plus explosif, mais le parquet fédéral, contrairement au clan Thambwe, ne demande pas aujourd’hui de classer définitivement la plainte. Les dossiers à sa charge et à celle de sa fille, résidente en Belgique et de nationalité belge, pour des faits de corruption ou de détournement d’argent, doivent continuer à être instruits par le juge Claise. Pour le parquet fédéral, il est donc trop tôt pour se prononcer sur la suite à donner sur ces faits de droit commun.
Résidence en Belgique ?
Les plaignants, eux, ne partagent pas cet avis. Leur avocat, Me Alexis Deswaef, a plaidé en ce sens ce jeudi devant la chambre des mises en accusation. Pour eux, il ne fait aucun doute que M. Thambwe est résident belge, quelles que soient ses fonctions en République démocratique du Congo. Et l’avocat de faire défiler toute une série de points qui démontrent selon lui que le second personnage de l’État congolais, homme particulièrement proche de Joseph Kabila, le président honoraire qui a conservé bien des rênes du pouvoir, est bien résident en Belgique.
Alexis Thambwe Mwamba a ainsi toujours conservé un domicile en Belgique, il dispose toujours d’un titre de séjour illimité, d’une voiture immatriculée dans notre pays, d’un appartement, qu’il fait entretenir (il déclare d’ailleurs les titres services aux impôts), sa femme et ses enfants (dont plusieurs résident en Belgique) ont la nationalité belge.
L’avocat brandit alors la “notion d’absence temporaire”, prévue par la loi et qui doit, selon lui, être retenue car malgré sa charge ministérielle en RDC Thambwe Mwamba a conservé “sa résidence principale en Belgique au sens de la loi”.
Si la justice belge décide de suivre la position de l’avocat des parties civiles, l’instruction du dossier pour crime de droit humanitaire pourrait se poursuivre en Belgique. C’est d’ailleurs le seul endroit où il pourrait encore être examiné, tant il est peu crédible qu’un juge congolais puisse se saisir de ce dossier. La chambre des mises doit se prononcer le 9 janvier.
La libre Afrique