Le désormais-candidat Joseph Kabila devenu presqu’un homme seul serait en train de bâtir une toute nouvelle famille politique pour marquer sa prochaine sortie politique.

Un univers politique des volontaires. Il serait en quête des nationalistes. Des démocrates et passionnés de la République démocratique du Congo avec lesquels engager une grande révolution politique dans une toute autre perspective d’actions à impacter solidement la configuration développementale du grand Congo. JKK garde une grande idée du Congo, même si ses ambitions avaient maintes fois heurté d’immenses barrières dans leur mise en œuvre par manque de collaborateurs fiables. Qu’il s’agisse du PPRD (Parti du peuple pour la reconstruction et le développement) dont il est le président national ou du FCC (Front Commun pour le Congo), coalition électorale dont la mollesse a déçu les ambitions du dauphin Emmanuel Ramazani Shadary en 2018, aucun de deux projets politiques n’avait réellement servi Kabila. Cette crise de maturité du kabilisme en tant que famille politique remonte à la présidentielle de 2006 dont le premier tour fut un fiasco pour un Joseph Kabila pourtant porté par l’ensemble des Congolais très reconnaissants de l’historique réunification du territoire national.

A l’époque, Kabila avait les meilleurs atouts pour remporter haut la main cette présidentielle au premier tour du 30 juillet 2006. Malheureusement, l’immaturité, l’amateurisme et la course à l’enrichissement facile vont l’emporter sur le déterminisme attendu de son entourage. Toute la logistique de campagne sera détournée par les lieutenants de Kabila. Véhicules, motos, vélos et autres engins seront découverts dans des résidences des grands dignitaires du régime à Kinshasa. La plupart d’entre eux n’avaient ni effectué de descente sur le terrain, ni envoyé les moyens de campagne aux électeurs de leur leader, puisque rassurés de la popularité incontournable de leur champion. Résultat, seuls 7.590.485 voix obtenues par Joseph Kabila contre 3.392.592 pour Jean-Pierre Bemba. Ce faible écart nécessitera un deuxième tour pour lequel Kabila décidera de se priver des politiciens véreux et d’associer pour la toute première fois sa femme Olive Lembe Kabila comme directrice de campagne. Ainsi, Vital Kamerhe, le premier directeur de campagne de Joseph Kabila sera mis en berne (au garage) pour laisser Olive prendre le devant de la campagne électorale dans une sorte de soutien de vengeance en faveur de son mari déçu de la faible moisson électorale de ses acolytes. L’exploit d’Olive fut remarquable. 9.436.779 voix contre 6.819.822 pour Bemba. C’était la toute première expérience d’OLK dans la politique active.

Kabila profondément déçu de ses hommes

D’abord le manque d’amour pour Kabila de la part de ses collaborateurs à qui il avait tout donné. En effet pendant 17 ans environ, Joseph Kabila Kabange a été éreinté de critiques, insultes, blâmes jusqu’à faire l’objet de désamour de la part des Congolais par manque de collaborateurs capables de le défendre. Toutes les affabulations lui attribuées, bien révélées fausses n’avaient jamais été démenties. Chacun des membres de son entourage immédiat se contentant de rassurer l’opinion que le chef ne pouvait suivre toutes les anneries et les hérésies imaginaires de l’opinion autour de sa personne. Pourtant, l’homme en a bel et bien souffert. Tantôt présenté comme le chauffeur de Defao Matumona, l’artiste musicien d’heureuse mémoire qui vient de décéder. Tantôt bombardé d’une rocambolesque attribution d’identité rwandaise sous un nom inventé par ses opposants “Kanambe Kazembere Hyppolite”. Tantôt, il était sciemment arraché à son propre père pour être qualifié de fils d’un rwandais. Et Tutti quanti. Il a fallu 20 années de silence et de grandeur d’esprit pour finalement entendre Defao Matumona déclarer n’avoir jamais rencontré Kabila, ni d’Adam, ni d’Ève. Pour que finalement, le président Félix Tshisekedi en personne se rende compte que Kabila n’est nullement lié au Rwanda que d’aucuns lui attribuaient par méchanceté politique puisqu’il n’y possède ni champ, ni village d’origine. Pour que la communauté congolaise réalise que Joseph était une proie fertile aux critiques et à toutes les flèches empoisonnées de ses adversaires.

C’est donc dans cet état de déception générationnelle que Joseph Kabila se verra amputé de sa majorité parlementaire en décembre 2020. Chute du bureau Mabunda. Difficile pour un leader qui a façonné sa famille politique pendant près de vingt ans de voir ses collaborateurs lui tourner le dos en direct à la télévision. “Nous avons décidé de répondre à l’appel du chef de l’État Félix Tshisekedi”, chantaient-ils. Et d’exceller en se disant “fatigués d’être dirigés comme des gamins” par un groupe d’hommes qui prend le chef en otage. S’adressant pour la dernière fois à son ancienne Majorité le 29 octobre 2020 à Kingakati, Joseph Kabila dira : “Je ne suis pas un prophète mais si, par je ne sais quelle magie, une nouvelle majorité naît des cendres du FCC, un ou deux mois après, l’opinion dira que ces députés coûtent trop cher à la République et qu’ils doivent repartir d’où ils sont venus”, fin de citation. Depuis, Kabila travaille seul ou presque. L’on aperçoit très périodiquement quelques chargés de communication tout autour de sa personne lorsqu’il n’est pas en week-end road trip à moto en compagnie de ses copains motards. Ou encore dans son maquis d’intellectuel révisant ses projets de thèses et préparant soigneusement ses mémoires. Kabila est donc un leader politique très occupé. Reclus à Kingakati, loin de la ville de Kinshasa avec sa famille, il a appris à connaître ses anciens collaborateurs. Dans leur confortable ingratitude et dans leur dangereuse méchanceté. Ils l’ont trahis à haute voix et à ciel ouvert. Devant les caméras.

Dans cette situation, Kabila a compris les limites de certains leaders politiques attachés uniquement aux intérêts immédiats. Il sait que beaucoup reviendront à la maison. Pendant ce temps, il scrute les nouvelles compétences politiques de la République. Qu’elles se situent à l’ouest ou au centre, il pourrait axer sa stratégie de recrutement sur les valeurs de paix, de réconciliation nationale et d’envol développemental.

Kabila, Tshisekedi, Katumbi, Fayulu…La rude campagne de 2023

Les tshisekedistes sont déjà en pleine mobilisation. Des coalitions se façonnent et des alliances se tissent. Pendant ce temps, les katumbistes s’enracinent dans l’implantation solide des structures et investissements du parti Ensemble pour la République. Des bâtiments sortent de terre et des mises en place se renforcent. Entre-temps, les fayulistes grondent d’ambition pour une présidentielle dans le délai constitutionnel. A l’ouest, Martin Fayulu veut tout prendre et ne rien laisser à ses adversaires. Et Kabila s’affiche enfin dans la bataille. Une bataille qui s’annonce électrique. Les rares fidèles, cas de Claude Mashala ou encore des jeunes et tonitruants communicateurs qui font la vedette des chaînes de télévision savent ce que coûte une trahison politique. Plusieurs kabilistes d’hier sont actuellement des membres influents du gouvernement. Beaucoup ont réussi à diriger leur ténébreux courage contre leur ancien chef devenu sénateur à vie. D’autres, plus sages, ont conservé des passerelles de fidélité avec le Raïs.

Landry Amisi
Ouragan

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