Grand vainqueur des législatives nationales et provinciales, le FCC veut tout contrôler – du gouvernement central jusqu’aux exécutifs – ne laissant qu’une infime portion au président élu, Félix-Antoine Tshisekedi. Entre le CACH et le FCC, il y a des étincelles en l’air. Dans le FCC, on pense tout mettre en œuvre pour quadriller le président de la République, en ne lui accordant aucune marge de manœuvre pour exécuter son programme. Le renouveau promis par Félix Tshisekedi risque d’être une chimère. Sa fête est en voie d’être gâchée.

Joseph Kabila est parti, tout en prenant soin de verrouiller le jeu politique. Avec son Front Commun pour le Congo, il s’est assuré d’avoir le contrôle de l’appareil de l’Etat. Avec une majorité confortable à l’Assemblée nationale – ce qui lui ouvre grandement la porte du gouvernement – et une forte présence dans les assemblées provinciales, Joseph Kabila et son FCC sont également assurés d’avoir toutes les manettes du pouvoir de l’Etat au cours de cinq prochaines années.

Le FCC a certes perdu à la présidentielle, mais il a conforté sa position aux législatives nationales. A la Chambre basse du Parlement, la plateforme électorale de Joseph Kabila revendique près de 350 sièges, contre environ 40 sièges pour son allié, le CACH, avec qui il est lié par un accord dont les termes relèvent encore du secret de Dieu. Au niveau provincial, le FCC s’est également taillé la part du lion, en alignant un nombre impressionnant de députés provinciaux pour les 715 sièges prévus dans les 26 assemblées provinciales de la RDC. Dans l’architecture institutionnelle issue des élections du 30 décembre 2018, le FCC est assuré de régner en maître. Dans ses rangs, on ne s’en cache pas.

Il y a cependant un bémol. C’est la victoire de Félix Tshisekedi, sorti du ticket gagnant présenté par le CACH, coalition formée entre l’UDPS et l’UNC de Vital Kamerhe.

Élu sur base d’un programme, le chef de l’Etat Félix Tshisekedi cherche aussi à s’assurer le contrôle de l’appareil de l’État. Son électorat l’attend au tournant. Au moment venu – sans doute en 2023 – il sait qu’il sera appelé à rendre des comptes. Pour le moment, la machine conçue autour d’un accord de « cogestion » conclu entre le FCC et le CACH, n’a pas encore présenté des signes de faiblesse.

En réalité, chacun gère à sa manière ses frictions internes. Néanmoins, au FCC, les tensions sont nettement visibles. La course aux postes au sein de différentes institutions, en commençant par le Parlement jusqu’au gouvernement, s’annonce âpre. Modeste Bahati, autorité de l’AFDC-A, a d’ores et déjà annoncé les couleurs. En réalité, Bahati n’est que la face révélée de l’iceberg. En interne, au sein du FCC, la gestion des ambitions est âpre du fait que des calculs politiques sont tout autres.

Le verrou

Selon des indiscrétions recueillies dans ses rangs, l’aile dure du FCC a décidé de tout contrôler, ne laissant qu’une portion congrue au CACH et au chef de l’Etat. Les partisans de ce courant s’appuient éventuellement sur l’alinéa 1 de l’article 78 de la Constitution qui stipule que « Le président de la République nomme le Premier ministre au sein de la majorité parlementaire après consultation de celle-ci… ».

Ravivé par son raz-de-marée aux législatives nationales, le FCC est déterminé à s’accrocher à cette disposition constitutionnelle. Mais, les plus modérés dans ses rangs prévoient d’accorder une passerelle au président de la République pour ne pas le gêner dans l’exercice de son mandat. Ils évoquent à cet effet l’accord conclu, bien avant la proclamation des résultats de la présidentielle, entre le FCC et le CACH. Dans ces conditions, le chef de l’Etat peut donc jouir de la possibilité d’aligner au sein du nouvel exécutif national certains de ses partisans, tout en prenant soin de respecter les dispositions de l’alinéa 3 de l’article 90 de la Constitution qui rappelle que « la composition du gouvernement tient compte de la représentativité nationale ».

Autrement dit, si le FCC accepte de cohabiter avec le CACH au sein du gouvernement, il est néanmoins assuré d’être le dominant. Ce qui pourrait être gênant pour le président de la République.

Il ne faut pas non plus oublier l’alinéa 1 de l’article 91 de la Constitution qui dispose en des termes clairs que « Le gouvernement définit, en concertation avec le président de la République, la politique de la nation et en assure la responsabilité ». Le dernier alinéa de cet article précise par ailleurs que « le gouvernement est responsable devant l’Assemblée nationale… ».

Avec une Assemblée nationale totalement acquise à sa cause, le FCC veut se lancer en solitaire dans la gestion de l’Etat. Entre le FCC et le président de la République, la coalition ou encore la cohabitation pourrait vite virer à une confrontation. En tout cas, aucune hypothèse n’est à minimiser.

Voilà donc des éléments qui indiquent que la fête promise par le président Félix Tshisekedi pourrait être gâchée à tout moment. La détermination du FCC à avoir la mainmise sur l’ensemble de l’appareil de l’Etat est confictogène. C’est un handicap que Félix Tshisekedi devra porter pendant les cinq ans de son mandat.

Le Potentiel / MCP

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