C’était le jour de la Saint Valentin, le 14 février dernier, que Félix Tshisekedi a apposé sa signature sur l’Ordonnance nommant le nouveau formateur du gouvernement made in Union Sacrée de la Nation. Après un long suspense, le Président de la République a jeté son dévolu sur Jean-Michel Sama Lukonde Kyenge, quarante-trois ans révolus. Et depuis quelque temps, celui-ci consulte l’ensemble des formations politiques et forces vives de la nation dans ses bureaux situés au dernier niveau de l’Hôtel du gouvernement. Le successeur de Sylvestre Ilunga Ilunkamba est en train de mettre sur pied une nouvelle équipe gouvernementale pour faire quoi ? C’est la question lancinante que se pose l’opinion.

En vue d’une meilleure approche de cette préoccupation fondée, il sied de jeter un œil dans le rétroviseur. Trois dates repères coïncidant avec trois discours historiques prononcés par le Président de la République constituent des lanternes qui éclairent le chemin parcouru.

Le premier discours fut prononcé un certain 23 octobre 2020. Cette soirée-là, Félix Tshisekedi dit «Fatshi Béton» employa un ton ferme et un gestuel inhabituel. Pendant près de six minutes, il va brosser un tableau sombre de la coalition FCC – CACH dont il signa le certificat de décès. Après deux années de gouvernance par ses poulains et ceux de son prédécesseur Joseph Kabila, le constat était donc très amer. Ce diagnostic escarpé a conduit irrémédiablement à la rupture.

Ce divorce FCC-CACH a coïncidé avec la création de l’Union Sacrée de la Nation, une vision du Président de la République calquée sur le leitmotiv légué par Feu son père : «le peuple d’abord». A la même date, Félix Tshisekedi a également parlé de la requalification de la majorité. Au souverain primaire, il a promis de revenir pour une autre allocution au terme des consultations de l’ensemble des forces politiques et forces vives de la nation.

La deuxième date repère c’est le dimanche 6 décembre 2020. Un discours amplement attendu par l’opinion tant nationale qu’internationale. En direct sur les antennes de la Radiotélévision nationale congolaise, Félix Tshisekedi a, d’un ton grave, prononcé l’une de ses meilleures allocutions selon certains analystes.

Tout en annonçant l’effritement de la majorité, le Chef de l’Etat est revenu pour préciser que le but ultime consistait en la mise en place d’une nouvelle équipe gouvernementale issue de l’Union Sacrée de la Nation. Il avait, à l’occasion, énuméré les suggestions et recommandations des structures et personnalités consultées. A cette date repère, il a annoncé la nomination d’un informateur en vue d’identifier, conformément à l’article 78 de la Constitution de la RD Congo, une nouvelle coalition gouvernementale. Adhérer à cette nouvelle vision, à l’Union Sacrée de la Nation, constitue donc la condition sine qua non pour intégrer le prochain gouvernement.

Le troisième tableau ou dernière date repère c’était le 14 décembre 2020. Ce jour-là, Félix Tshisekedi s’est retrouvé face aux Députés et Sénateurs réunis en Congrès dans l’hémicycle du Palais du peuple. Le constitutionnel discours sur l’état de la nation fut prononcé.

Devant les deux Chambres du Parlement, le Président de la République est revenu pour déclarer que la nouvelle majorité a pris corps et brosser les grandes lignes d’une nouvelle feuille de route ou programme de gouvernance qui traduira dans les faits les ambitions de l’Union Sacrée après investiture du gouvernement.

Avec ses différentes prises de position, le fils biologique et politique du Sphinx de Limete, d’heureuse mémoire, a secoué la sphère politique de son pays. L’une des conséquences de la création de l’Union Sacrée de la Nation aura été la chute vertigineuse du Bureau Mabunda malgré les élucubrations. Le FCC cher à Joseph Kabila avait promis une «remontada» lors de l’élection du Bureau définitif de l’Assemblée Nationale mais sans succès. Avec 389 voix pour Christophe Mboso et 365 voix pour Jean-Marc Kabund, le ticket gagnant de l’USN n’a pas fait de cadeau au camp adverse, la nouvelle minorité ou opposition.

Quelques jours après, ‘‘pépé’’ Ilunga Ilunkamba et son gouvernement sont tombés comme des feuilles mortes à l’issue du vote sans appel de la motion de censure à la Chambre basse du Parlement sous la houlette du Bureau d’âge. Un désaveu qui a contraint l’ex-Premier Ministre a déposé sa lettre de démission et de l’ensemble de son gouvernement auprès du Chef de l’Etat.

Autre fait marquant, c’est la chute imprévisible du Bureau Thambwe Mwamba au niveau du Sénat. Six membres dont le Président de cette institution ont jeté l’éponge avant l’examen des pétitions. Il y a eu un seul rescapé, en l’occurrence, le 1er Vice-président Samy Badibanga. Dans l’entre-temps, l’informateur nommé par le Chef de l’Etat, le Sénateur Modeste Bahati, avait presque bouclé sa mission en octroyant à Félix Tshisekedi une majorité écrasante (391 Députés) acquise à sa cause.

Pour boucler la boucle, le Président de la République devenu Président de l’Union Africaine a nommé un nouveau Premier Ministre, Jean-Michel Sama Lukonde Kyenge. Ce dernier a promis de former un gouvernement dit des «Warriors», des personnalités aguerries. Depuis le jour de sa nomination, ce quadragénaire ne cesse de marteler sur les critères de probité morale, de compétence et d’expérience. Ajouter à cela un casier judiciaire vierge. Il met aussi un accent particulier sur la jeunesse et la femme de même que la réduction de la taille du gouvernement (44 membres).

Ces membres du tout premier gouvernement made in Union Sacrée seront connus avant le 15 mars, c’est-à-dire, avant la prochaine Session au Parlement. A chacun de ses interlocuteurs (partis politiques et société civile), Sama Lukonde donne un devoir à domicile : étoffer le programme de gouvernance. Car, les défis sont majeurs, les attentes sont innombrables, tout est prioritaire en RD Congo. Il suffit de parcourir le discours historique du 6 décembre 2020 pour s’en convaincre. L’accès à l’eau potable, l’énergie électrique, aux soins de santé adéquats, à un enseignement de qualité, à la sécurité et la paix, etc.

Pendant la session de mars, l’équipe Sama Lukonde devra solliciter l’investiture à l’Assemblée Nationale avant de procéder à la remise-reprise. Le temps de s’installer et de dresser l’état des lieux, le prochain gouvernement ne sera effectivement opérationnel qu’au milieu de l’année en cours (juin 2021). Au sortir de leur tête-à-tête, le vieux sage Mboso, se tenant aux côtés du jeune Sama Lukonde, a déclaré que c’est un gouvernement de combat qui doit vite voir le jour au vu de la tâche corsée. Telle est la mission. Plus de temps à perdre, il faut se mettre au travail. Car, seul Félix Tshisekedi sera comptable devant le souverain primaire lors des prochaines échéances électorales. En 2023 ou 2025 ? Wait and see.

La Prospérité

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