Un des principes sacrosaint du droit est celui de l’impartialité de la loi. En annonçant urbi et orbi que Moïse Katumbi sera poursuivi pour faux et usage du faux parce qu’il aurait assumé des fonctions officielles alors qu’il ne serait pas Congolais, le procureur général de la République est contraint d’appliquer à tout le monde la même mesure. La logique imposerait même que le PGR commence par tous ceux qui exercent actuellement des fonctions publiques alors qu’ils détiennent concurremment la nationalité congolaise avec une autre étrangère. C’est une boite de pandore que le pouvoir de Kinshasa vient d’ouvrir. Le PGR est désormais contraint de traquer tous ceux qui exercent les fonctions publiques alors qu’ils ont des nationalités étrangères.

La polémique sur la nationalité ou la double nationalité est revenue dans les débats politiques en République démocratique du Congo. Comme par hasard, ce débat cynique surgit alors que la République démocratique du Congo est en train de négocier le dernier virage qui doit conduire à la ténue d’un cycle complet des élections, du sommet à la base.

C’est le moment que les ennemis de la République ont choisi pour ressusciter la polémique sur la nationalité. « Nous venons d’ouvrir une information judiciaire à charge de Moïse Katumbi pour que le moment venu il puisse répondre de tous ses actes. Comment voulez-vous qu’un individu se sachant de nationalité italienne puisse se présenter devant nos bureaux pour avoir le passeport, la carte d’électeur ? Tout ce temps qu’il a passé à la tête de la province, il se prévalait des actes faux, et de faux documents », a déclaré le procureur général de la République, Flory Kabange Numbi sur radio Okapi.

Cette polémique est-elle une distraction ? Que vise vraiment la majorité présidentielle en remettant cette polémique sur la place publique ? Veut-on vraiment régler une fois pour toute cette question de la « nationalité une et exclusive » ? Pourquoi cette polémique intervient seulement maintenant ? Serait-il un hasard qu’un candidat à la présidentielle de l’Opposition soit visé, du reste injustement ? Rien n’est moins sûr.

Tout indique que la majorité au pouvoir veut donner un coup fourré au processus électoral afin de bloquer une fois de plus l’alternance démocratique attendue à l’issue des élections du 23 décembre 2018. Sinon, l’on voit mal comment le régime de Kinshasa peut sortir indemne de cette question alors que plusieurs personnalités dans les institutions publiques détiennent bel et bien de nationalité étrangère. De la présidence de la République au Parlement en passant par le gouvernement, les cours et tribunaux, les régies financières ou les entreprises publiques, on trouve des personnalités qui exercent présentement des fonctions publiques alors qu’ils ont une double voire triple nationalité.

MANOEUVRES DILATOIRES

La majorité au pouvoir seraitelle donc en train de scier l’arbre sur lequel des centaines de ses cadres sont perchés ? Pas si sûr. C’est juste une chasse aux sorcières. Autant le régime en place à Kinshasa n’a jamais lutté efficacement contre la corruption – parce qu’organisé par le pouvoir -, autant il ne pourrait pas traiter de manière équitable la question de la nationalité parce que ses cadres sont les plus nombreux à être concernés. Dès lors, la polémique sur la nationalité est une manoeuvre dilatoire pour, soit retarder l’organisation des élections, soit un stratagème pour précipiter l’implosion de la République démocratique du Congo.

Il est notoirement connu que Kinshasa a juré de nuire à l’ancien gouverneur de l’ex-Katanga. Ainsi, toute manoeuvre est bonne pourvue que ça puisse bloquer le retour de Moïse Katumbi en RDC et surtout l’écarter du processus électoral.

Pour autant, la loi et dure mais c’est la loi. La constitution congolaise stipule que « la nationalité congolaise est une et exclusive », elle ne peut pas être détenue concurremment avec une autre nationalité étrangère.

Si la RDC se décide d’appliquer cette disposition, il faut le faire indistinctement à tout le monde. La loi est impersonnelle. On ne peut ouvrir une information judiciaire pour un individu sur la question de la nationalité. Il faut plutôt mener une opération de traque contre tous ceux qui exercent actuellement, ou qui ont exercé, un mandat public sans en avoir la qualité au regard de la nationalité congolaise.

Les crises en RDC naissent toujours des injustices. Si la question de la nationalité n’est pas traitée dans la justice, il y a risque de créer une nouvelle crise. Dieu seule sait qui cette nouvelle crise va emporter. La RDC est notre bien le plus précieux. Pourquoi certains ont-ils intérêt à mettre le pays en feu juste parce qu’ils veulent nuire à un individu ?

Le Potentiel

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