Par son Arrêt rendu lundi 13 avril, la Cour Constitutionnelle met un terme à la virulente polémique qui a secoué le microcosme politique sur l’inconstitutionnalité de l’Ordonnance présidentielle proclamant l’état d’urgence. En effet, le speaker du Sénat, Alexis Thambwe Mwamba avait soutenu que cet acte viole l’article 111 de la Constitution qui exige pour toute proclamation de l’état d’urgence, l’entérinement par le Congrès. C’est ce qui est écrit noir sur blanc.

Mais les défenseurs de l’Ordonnance avaient, eux, invoqué deux autres dispositions de la même constitution, les articles 85 et 145, qui ne font pas référence à l’aval du Congrès. L’article 85 parle seulement de la concertation par le Président de la République, du Premier ministre ainsi que des Présidents des deux Chambres. Tandis que l’article 145 évoque, lui, le texte délibéré au conseil des ministres et soumis pour le contrôle de sa constitutionnalité à la Cour constitutionnelle, qui statue, toutes affaires cessantes. Ils ont aussi raison, car c’est aussi noir sur blanc dans la Constitution.

Dans le camp des  » pro-Ordonnance « , le leader du Mouvement Lumumbiste progressiste (MLP), le député honoraire Franck Diongo, avait même tranché en évoquant une jurisprudence de la Cour suprême de justice ayant rendu un Arrêt en 2007 sur cette matière en établissant que le Congrès n’est pas requis pour la proclamation de l’état d’urgence.

La Cour Constitutionnelle à qui le Président de la République avait transmis son Ordonnance sur l’état d’urgence pour se prononcer sur sa constitutionnalité conformément à l’article 145 de la Constitution les a départagés. Dans son Arrêt, la Haute cour se prononce en disant que l’Ordonnance présidentielle ayant proclamé l’état d’urgence en RDC est conforme à l’article 85 de la Constitution qui donne au chef de l’Etat des pouvoirs pour déroger à la Constitution.

Ce n’est pas tout en ce qui concerne les motivations de la Cour Constitutionnelle. Elle s’est aussi référée comme jurisprudence à l’Arrêt de la Cour suprême de Justice rendu en juin 2007 qui exclut l’aval du Congrès des deux Chambres parlementaires.

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Dès qu’il a pris connaissance de cet Arrêt de la Cour Constitutionnelle sur la légalité de l’Ordonnance de l’état d’urgence, l’élu 1er degré de la ville de Mbandaka, capitale de la province agricole de l’Equateur, Henri-Thomas Lokondo s’est incliné. Et pour cause. Les Arrêts de la Cour Constitutionnelle ne sont susceptibles d’aucun recours et sont immédiatement exécutoires. Il n’y a pas le moindre commentaire à y réserver. Raison pour laquelle il estime, à juste titre, que le débat sur la convocation du Congrès pour entériner cette ordonnance est clos. Sauf naturellement si au bout d’un mois d’état d’urgence sanitaire, il se poserait un problème de prolongation, là il faudrait alors revenir au Congrès pour en débattre.

Par ailleurs, l’élu de Mbandaka plaide pour que le Parlement soit associé dans la lutte contre le Covid-19 que mène le gouvernement. Ce qui n’est pas le cas, à ce jour. Il manque cet apport institutionnel du Parlement et il serait mieux d’y remédier.

Pour revenir sur cet Arrêt de la Cour constitutionnelle qui met fin, comme le dit Henri-Thomas Lokondo Yoka au débat, on retient qu’il autorise le Chef de l’Etat à déroger à la Constitution. Qu’est-ce à dire ? Attention. C’est de ne pas toucher aux droits fondamentaux consacrés dans la Constitution comme entre autres le droit à la vie, interdiction de l’esclavage, la torture, l’emprisonnement pour des dettes qui est prohibé, le droit d’appel, le droit à la défense, etc. Tous ces droits fondamentaux restent intangibles pendant l’état d’urgence. Par exemple, les autorités ne peuvent se servir de ce prétexte pour tuer ou torturer ou encore emprisonner des gens pour des dettes.

Mais ce qui est autorisé, c’est la restriction de certaines libertés fondamentales pendant la période d’état d’urgence comme celle de manifester qui est recouvrée dès la fin de l’état d’urgence. En tout état de cause, ce débat n’était pas inutile. Loin s’en faut. Mais il a eu le mérite de fixer, une bonne fois pour toutes, l’establishment congolais, sur les pouvoirs du Président de la République et ceux de deux chambres parlementaires au sujet de la proclamation de l’état d’urgence.

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Kandolo M.
Forum des As

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