Devant la démonstration implacable que Félix Tshilombo a fait usage de faux documents pour tromper la religion de la Ceni, beaucoup de commentateurs politiques pensent qu’il faut fermer les yeux et laisser tout de même le candidat de l’UDPS dans la course. Au nom de quoi ? Au nom de la politique, soutiennent-ils.
Mais Kajepa Molobi, analyste de la Majorité présidentielle, pense que « vouloir à tout prix maintenir Félix Tshilombo Tshisekedi, sous le fallacieux prétexte de rechercher l’inclusivité des élections, serait faire montre d’une faiblesse grave. Nous aurons, argue-t-il, par cet acte, inauguré une dangereuse jurisprudence. Nous aurons officiellement communiqué aux prétendants à tous les postes que les conditions d’entrée ne sont exigées qu’à titre folklorique et que l’on peut y déroger sans coup férir. Nous aurons, ainsi, montré à notre peuple et à la face du monde qu’en République démocratique du Congo on peut arriver à tout, à condition de savoir mentir ».
Pour lui, le cas Félix Tshilombo n’est pas seulement une question de droit, ni une question politique, c’est, avant tout, une question de morale et des valeurs que l’on veut instaurer dans une nation. Voici l’intégralité de son analyse.
Beaucoup de Congolais ont été surpris que la Ceni ait repris, sur la liste provisoire des candidats admis à la présidentielle du 23 décembre 2018, le nom de Félix Tshilombo Tshisekedi. Pourquoi ? Parce que la presse venait d’étaler, pendant toute une semaine, les preuves de l’existence de fausses déclarations dans le dossier du candidat de l’UDPS, notamment la mention de deux diplômes qui n’existeraient pas.
Depuis, ni le candidat, ni son parti politique encore moins la Ceni, n’ont réagi. Du coup, une série de questions vient à l’esprit du citoyen moyen : Comment comprendre cette réaction de silence ? Doit-on conclure à l’adage : « qui ne dit mot consent » ou estimer que les Congolais sont indifférents à la morale et à la justice la plus élémentaire ? Doit-on penser que dans ce pays l’exigence de se conformer à une quelconque réglementation a vraiment disparu ? Où en est-on avec le combat contre les antivaleurs, un de leitmotiv de la Conférence Nationale Souveraine des années 90 ? Qu’a-t-on fait de la maxime : « ne jamais trahir le Congo » ?
Les informations à notre portée confirment que le curriculum vitae présenté par le candidat de l’UDPS ne correspond en rien au cursus qui a véritablement été le sien. Le curriculum vitae déposé à la Ceni renseigne que Félix Tshilombo a fait son école primaire au collège Boboto et, ensuite, ses humanités à l’Athénée Royal du Centre à Bruxelles. Si le collège Boboto existe bel et bien au centre de Kinshasa, nous en sommes encore à espérer localiser l’Athénée Royal du Centre qui serait situé dans la capitale européenne. Mais, ce dont nous sommes certains, c’est qu’aucun Athénée Royal Belge ne délivre un parchemin dénommé « Diplôme d’État ». Bien plus grave, des dizaines de Kinois de la génération de Félix Tshilombo savent que ce dernier a fréquenté le collège Lisanga à Kinshasa et qu’il a abandonné ses études au niveau de la 4ème secondaire.
Pour ce qui est des études supérieures, le curriculum vitae mentionne que le candidat Président de la République a étudié à l’ICC Bruxelles et qu’il y a obtenu un diplôme de graduat en Marketing. La vérité est maintenant établie. L’ICC existe bel et bien. Notre candidat a fréquenté cet institut pendant une année dans l’option comptabilité, avant de disparaître dans la nature pour y réapparaître des années plus tard et tenter une autre option. Là aussi, celui qui se veut futur Président de la République n’a fait qu’une année avant de disparaître à nouveau. Ces faits nous démontrent que nous avons affaire à un homme inconstant, incapable de se fixer des objectifs et de mettre en œuvre les efforts nécessaires pour atteindre ses buts. Est-ce entre les mains de ce genre d’homme que nous devrions abandonner la destinée de la nation congolaise ? La RDC ne mérite-t-elle pas mieux ?
Il aurait donc suffi à Félix Tshilombo de faire état de ses stages et autres occupations exercées au sein du parti fondé par son père et ses compagnons. Pourquoi alors M. Tshilombo a-t-il voulu, pour se présenter à ce prestigieux poste, usurper des qualités qui lui manquent ? Il y a ici un signe de sa personnalité, qui ne trompe pas. « Qui a volé un œuf, volera un bœuf », prévient la sagesse populaire. Ce mensonge dévoile une autre caractéristique du personnage. M. Tshilombo n’est pas digne de confiance. Il ne saurait donc pas être crédible à la tête de la nation.
Nous ne pouvons pas tolérer ce genre de faiblesse et d’agissement de la part d’un homme qui prétend au leadership de la nation congolaise. Les hommes et les femmes qui projettent de diriger un jour ce pays, doivent se préparer en conséquence et se montrer exemplaire.
De plus, comment comprendre que les concitoyens qui ont, des années durant, exigé avec la plus grande hargne que Joseph Kabila Kabange, Président de la République, respecte la Constitution et les lois de la République, se montrent, eux-mêmes, si peu regardant à l’égard de leur candidat ? La question ici s’adresse non seulement aux militants de l’UDPS mais aussi à l’ensemble des intellectuels congolais.
Puisque le Président de la République a montré l’exemple en respectant la loi, il importe que ceux qui visent à le remplacer fassent de même.
Vouloir à tout prix maintenir Félix Tshilombo Tshisekedi, sous le fallacieux prétexte de rechercher l’inclusivité des élections, serait faire montre d’une faiblesse grave. Nous aurons, par cet acte, inauguré une dangereuse jurisprudence. Nous aurons officiellement communiqué aux prétendants à tous les postes que les conditions d’entrée ne sont exigées qu’à titre folklorique et que l’on peut y déroger sans coup férir. Nous aurons, du même fait, montré à notre peuple et à la face du monde qu’en République démocratique du Congo on peut arriver à tout, à condition de savoir mentir. Ici, ce n’est pas seulement une question de droit, c’est aussi une question de morale et des valeurs que l’on veut instaurer dans une nation.
Pour que la nation vive, il y a des limites à ne pas franchir. L’usage des faux documents en constitue une substantielle.
KM
L’Avenir / MCP