Des sources croisées font état d’un projet d’ordonnance devant commuer la peine de mort en peine de 20 ans de prison. Or, l’ancien Aide de camp de M’Zee LD Kabila entre dans cette catégorie.

Après dix neuf ans d’emprisonnement à l’ex-Prison centrale de Makala à Kinshasa, le colonel Eddy Kapend serait-il en passe de recouvrer sa liberté ? En tout cas, on en parle de plus en plus depuis un certain temps. Les Runds, l’une des plus importantes communautés du Sud de l’ex-Katanga, à laquelle appartient cet ancien Aide da camp de feu Mzee Laurent-Désiré Kabila, ne fait plus aucun mystère de sa position sur cette affaire.

Tout récemment, le Grand Chef Mwant Yav de l’espace Lunda, a relayé à haute et intelligible voix, ce que ses sujets demandent sans cesse, voire réclament depuis quelques temps. A savoir la mise en liberté d’un des leurs, Eddy Kapend, condamné à la peine de mort depuis 2003, à l’issue du procès de l’assassinat du troisième président de la RD Congo, M’Zee Laurent-Désiré Kabila, abattu le 16 janvier 2001.

Même si les faits pour lesquels Eddy Kapend avait été arrêté et condamné à mort sont graves, des voix s’élèvent de plus en plus pour dire que cette grande figure des Forces armées de la RD Congo (FARDC), anciennement FARC, mérite d’être libéré.

Sujet certes sensible, parce que évoquer cette libération d’Eddy Kapend, renvoie directement à l’assassinat du tombeur de feu le maréchal Mobutu en mai 1997. A savoir M’Zee Laurent-Désiré Kabila d’heureuse mémoire, pleuré non sans raison par tous les Congolais. On revoit encore les images des funérailles, comme s’ils étaient organisés hier, lors de l’arrivée de la dépouille aussi bien à Kinshasa qu’à Lubumbashi.

Sans remuer le couteau dans la plaie, il est cependant normal, qu’au niveau de la famille biologique du défunt, les différentes requêtes en rapport avec la mise en liberté des personnes condamnées à mort par le tribunal militaire de l’ancienne Cour d’ordre militaire (COM), soient mal digérées. Car, la famille garde encore frais dans sa mémoire, le triste souvenir de cet ignoble assassinat d’un Chef d’Etat en qui avait cru toute la population congolaise.

Néanmoins, plus d’un analyste brandissant l’impératif de la réconciliation, la cohésion et l’unité nationales, pensent que la libération d’Eddy Kapend ne doit pas être considérée comme la fameuse ligne rouge à ne pas franchir. Bien au contraire. Voilà donc, qui justifie les appels de plus en plus pressants en faveur de la relaxation de cet officier supérieur des Fardc. Les demandes ne sont pas seulement de la Communauté Lunda, l’une des plus grandes au Katanga et même dans l’ensemble de la RD Congo, mais aussi de plusieurs activistes des Ongs locales de Défense des droits de l’homme.

Outre les raisons légitimes liées à la nécessaire réconciliation nationale, de nombreux observateurs estiment qu’au regard du gout inachevé de ce procès qui avait duré près de 10 mois, tant les doutes subsistent, il ne serait pas mal à propos de libérer cet homme qui a déjà passé plus d’une décennie en prison.

UN PROJET D’ORDONNANCE EN GESTATION

Toujours en rapport avec la problématique de la libération du colonel Eddy Kapend, des sources croisées font état d’un projet d’ordonnance devant commuer la peine de mort en peine de 20 ans de prison. Dès lors que l’ancien Aide de camp de M’Zee Laurent-Désiré Kabila entre dans cette catégorie, d’aucuns pensent que sa mise en liberté ne devrait plus poser aucun problème.

Dans un tweet attribué hier à un membre du cabinet de Fatshi, on apprend que la commutation de la peine de servitude pénale à perpétuité, en celle de 20 ans de servitude pénale principale, est devenue irrévocable à la date du 30 juin dernier. Selon le tweet, ne sont pas concernées par la remise, réduction et commutation, les condamnées fugitifs, les personnes condamnées pour les crimes contre la paix et la sécurité de l’humanité, violences sexuelles, détournements et concussions, corruption, rémunérations illicites, assassinat, meurtre, atteinte à la sureté de l’Etat et intégrité du territoire.

Par ailleurs, précise le même tweet, la remise de la peine restant à exécuter est accordée à toute personne condamnée à une peine de servitude pénale ou des travaux forcés inférieurs à 5 ans, la réduction de 5 ans de peine restant à subir, égale ou supérieure à 5 ans. Eu égard à toutes ces précisions, tout porte donc à croire que le colonel Eddy Kapend est bel et bien concerné. L’histoire renseigne que dans nombre pays, à chaque célébration de ‘indépendance du pays, le Chef de l’Etat, au nom de la réconciliation nationale, gracie certains prisonniers. Ainsi, fait observer un observateur, le cas Eddy Kapend pourrait donc rentrer dans cette tradition.

L’APPEL DE L’ASADHO A FATSHI

En février 2014, fut promulguée la loi n°014/006 du 11 février 2014 portant amnistie pour faits insurrectionnels, faits de guerre et infractions politiques. Cette amnistie couvrait la période allant du 18 janvier 2006 au 20 décembre 2014.

Cependant, il s’est avéré que toutes les personnes condamnées dans l’affaire d’assassinat de M’Zée Laurent-Désiré Kabila qui devraient aussi bénéficier de cette loi d’amnistie, n’avaient pas été prise en compte parce qu’ayant été malheureusement et totalement exclues par la période couverte par ladite amnistie. Ce qui avait suscité plusieurs réactions dans les rangs des activistes des ongs de défense de droits de l’homme.

A la suite du changement de régime intervenu en janvier 2019 au plus haut sommet de l’Etat, l’Association africaine de défense des droits de l’homme(ASADHO), avait au mois de mai de la même année, appelé le nouveau président Félix Tshisekedi à  » tenir totalement sa promesse de décrispation politique, en faisant aussi libérer tous les prisonniers amnistiés du dossier d’assassinat de Laurent Désiré Kabila « . Des détenus que l’Asadho avait appelés sous le nom de  » Eddy Kapend et consorts « .

Dans son appel à Fatshi, cette Association de défense des droits de l’homme avait souligné que le procès contre  » Kapend et consorts « , conduit par la Cour d’Ordre militaire (COM), avait été  » marqué par la violation de toutes les garanties constitutionnelles  » et qu’il était  » inéquitable  » au regard des standards internationaux.

On rappelle que la Cour d’Ordre militaire fut une juridiction d’exception créée par un décret de Mzee Laurent-Désiré Kabila le 27 mai 1997, peu après son arrivée au pouvoir. C’est cette juridiction qui a jugé, à partir de mars 2002, les assassins présumés du président Laurent-Désiré Kabila, tué dans son bureau le 17 janvier 2001. Le procès fut entamé contre 115 prévenus. Trente peines de mort furent prononcées à l’issue du jugement de ce procès rendu le 7 janvier 2003 dans l’ex-Prison centrale de Makala. Parmi les personnes condamnées, le colonel Eddy Kapend Irung, l’éminence grise du régime de M’Zee Laurent-Désiré Kabila.

Selon le document de l’Asadho rédigé le jeudi 16 mai 2019, les condamnés avaient pourtant été amnistiés le 19 décembre 2005. Mais sans effet. En novembre 2013, la Commission africaine des Droits de l’Homme et des Peuples avait recommandé leur libération. Mais sans succès non plus. En décembre 2016, l’Accord de la Saint-Sylvestre les avait identifiés comme pouvant être libérés au titre de la décrispation politique; sans effet. Et lors de la libération des prisonniers politiques décidées par Félix Tshisekedi, en mars 2019, ils n’ont pas fait partie des libérés. « L’injustice  » à leur égard  » est flagrante et incompréhensible », écrivait l’Asadho, avant de qualifier les faits de  » discrimination « .

Grevisse KABREL
Forum des as

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