L’Observatoire de la Dépense publique (ODEP) – ONG créée en 2011 par douze organisations de la société civile congolaise – a rendu ce 4 janvier son rapport « de contrôle citoyen de l’exécution du budget global et des dépenses publiques pro-pauvres » pour la période 2017-2019. L’ONG y estime que « la mauvaise gouvernance des finances publiques demeure et empire ».

Les analystes de l’ONG n’ont pas séparé 2019 – année où la Présidence est exercée par Félix Tshisekedi en coalition avec les kabilistes – des deux précédentes, quand Joseph Kabila était chef de l’Etat parce qu’ »il n’y a pas eu amélioration en 2019, au contraire, la gouvernance est allée de mal en pis ».

Enorme et préjudiciable au développement

Constat général, d’abord: de 2017 à 2019, les recettes ont atteint 18,6 milliards de FCongolais, au lieu de 24 milliards prévus; et les dépenses 19,3 milliards de FC, au lieu des 24 milliards prévus. Les dépassements de prévision atteignent 235,8% en frais de fonctionnement et 101,4% en rémunérations.

L’ODEP note que les dépenses urgentes représentent 18% du total des dépenses, un chiffre « énorme et préjudiciable à la réalisation des objectifs du Plan de développement en général, et particulièrement ceux des secteurs pro-pauvres ». « A qui ont-ils bénéficié? », interroge l’ONG, qui souligne que la Banque centrale du Congo (BCC) a dépensé 680 milliards de FC de « dépassement dont les sources de financement méritent clarification ».

Manque de volonté du pouvoir central

Les analystes de l’ODEP s’intéressent en particulier aux principaux secteurs porteurs de développement. Ils notent ainsi que les budgets dévolus à la santé ne sont exécutés qu’à 51,23% en moyenne pour les trois années étudiées. Mais sur cette part, 93% des dépenses effectuées sont liés au fonctionnement du ministère et aux rémunérations, tandis que 7% seulement vont aux actions prioritaires. L’ONG y voit un « manque de volonté du pouvoir central d’améliorer les conditions sanitaires de la population ».

Même constat sans appel à l’analyse des budgets de l’enseignement non universitaire. Ces budgets ont été réalisés à 79% en moyenne pour les trois années retenues. Ce serait un progrès par rapport à la santé si l’on ne constatait pas que 99,5% des sommes dépensées l’ont été pour les fonctionnement du ministère et des rémunérations, ce qui ne laisse que 0,5% pour les actions prioritaires.

Un simple slogan, non suivi d’effet

Dans le domaine de l’agriculture, les budgets ne sont réalisés, en moyenne, qu’à … 13,2%. Et 97% des sommes déboursées vont à l’administration, le reste au développement des filières végétales. Cela montre, souligne l’ODEP que « l’agriculture « priorité des priorités » n’est qu’un slogan du pouvoir central ». Bien que Kinshasa ait signé l’Accord de Maputo prévoyant que 10% des budgets africains seront consacrés à l’agriculture, au Congo ce secteur ne s’est vu attribuer que 7,6% du budget en 2017, 1,59% en 2018 et 3,5% en 2019.

Il en va de même pour le Développement rural: 90% des sommes reçues vont à l’administration, alors que la part de ce ministère dans le budget national n’est que de 2% en 2017, 1,8% en 2018 et 2,2% en 2019.

Une exception

Sort du lot le ministère de la Pêche et de l’Elevage. Son budget est passé de 0,4% en 2017 à 20,6% en 2018 et 11,3% en 2019. Et – miracle! – seuls 4% de ces budgets ont été consacrés à l’administration, le reste allant au développement de ces secteurs. Cela « profiterait réellement à la population si le ratio était conséquent entre le budget général et la part réservée à ce secteur », regrettent les analystes.

Plus généralement, le rapport note que « l’exécution des lois de finances 2017-2019 n’a pas été conforme aux lois de finances y afférentes » et n’a pas permis de « créer des richesses, ni de promouvoir une croissance économique pro-pauvres, ni d’améliorer les conditions sociales de la population ». Et de proposer une série de recommandations aux autorités – recommandations que l’ont pourrait résumer sous le titre: voici comment on gouverne (voir notre lien avec ce rapport de l’ODEP).

La libre Afrique

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