Leaders de premier rang, Kamerhe et Bemba drainent derrière eux du beau monde. Les deux ont l’envergure nationale, la stature de présidentiable, mais le contexte les oblige à s’aligner derrière Félix Tshisekedi à la présidentielle de 2023. Eux-mêmes se plient parce que Félix Tshisekedi a mis en place une stratégie qui les contraint à se soumettre.

Tshisekedi a compris que le pouvoir et l’argent sont un appât pour les politiciens congolais. À Kamerhe et Bemba, le président leur a donné ce qu’ils cherchent. Premièrement, le pouvoir, chacun avec ses membres du parti au gouvernement. Des ministères clés leur sont attribués en échange de soutien à sa vision, son action et maintenant à sa candidature. Pour bien les tenir, il conditionne désormais la participation d’un parti au nouveau gouvernement Sama 2 à l’adhésion à l’Union sacrée désormais plateforme politique ou électorale.

Bemba et Kamerhe obligés de revoir leurs ambitions à la baisse

Bien qu’ambitieux, Jean-Pierre Bemba Gombo ne serait pas prêt aujourd’hui de saborder le deal avec le régime. Lui qui est en reconstitution politique et financière. D’abord, le Mlc qui a connu le départ de beaucoup de cadres se remet à l’eau. Deuxièmement, l’ancien vice-président peut se frotter les mains d’engranger des millions avec des procès à gauche et à droite qui lui permettent de souffler après la disette de la CPI. Et enfin, Jean-Pierre Bemba Gombo n’est pas prêt aujourd’hui à se séparer de Félix Tshisekedi au risque de perdre les juteux ministères de l’Environnement et de la Santé, mais y compris l’entreprise minière Sakima où il a placé son bras droit Fidèle Babala. Tout ça pèse dans la tête du chairman et réduit ses marges de manœuvre.

Kamerhe se trouve aussi dans la même complexité. Frustré, il l’est surtout quand il réalise qu’il a construit ce pouvoir de ses mains depuis l’épisode de Genval, Nairobi et après la longue campagne électorale, mais que ce sont les Mboso, Bahati, Sama qui jouent aujourd’hui les premiers rôles, son cœur enfle. Mais, il est obligé de faire avec, de se résigner. Sorti de la prison, il doit aussi se reconstituer, se rebâtir, se refaire une santé politique et financière. Bâtir son patrimoine, mais surtout éviter les frustrations au sein du parti. La plupart des cadres voudraient renouveler l’accord politique avec Fatshi que de faire un saut dans l’inconnu, combat qui les amènerait tout droit à l’opposition. Pilule difficile à avaler donc pour VK appelé par ses plus proches à un dépassement de soi. Des radicaux qui travaillent pour la conservation du pouvoir ne voient pas Kamerhe se détacher de Fatshi. “Il a tout à gagner avec nous sinon il subira le sort de Fayulu”, lâche un membre influent du cercle du pouvoir.

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Face à Bemba et Kamerhe, le plan B de Félix Tshisekedi

Dans les fiefs où Kamerhe et Bemba se considèrent leaders incontournables, Tshisekedi a d’autres cartouches de rechange. Dans le grand Équateur, Fatshi mise aussi sur Guy Loando, Jean-Lucien Bussa, Jean-Pierre Lihau et les autres jeunes qui montent aujourd’hui en puissance. Les trois peuvent grignoter l’électorat de Bemba, même s’ils ne feront pas totalement le poids. Mais ce sont toujours des cartes que Tshisekedi peut utiliser pour secouer le leader du Mlc. Kamerhe, de son côté, devra faire face avec l’inépuisable Bahati Lukwebo, le leader de l’AFDC et président du Sénat comme aussi à Claude Nyamugabo avec son encrage certain, Bulambo Kilisho populaire au sein de sa communauté – les Rega, Norbert Kantintima dont le fils prend petit à petit la relève, Mushi Bonane… . Bref, Tshisekedi peut émietter son électorat afin de l’affaiblir dans son propre fief – le Sud-Kivu, que VK utilise comme sa rampe de lancement depuis 2006. Pire pour le mettre mal à l’aise, il peut l’opposer à l’actuel ministre du Budget, Aimé Boji. Depuis, un temps, le nouveau riche prend subtilement ses distances avec son boss. La diversification de candidatures dans le bastion de Vital Kamerhe peut mathématiquement le faire réfléchir. Même si Tshisekedi aura du mal à se faire accepter dans le Kivu à cause de la guerre et de son bilan, mais il ne tolérera jamais que Kamerhe se retourne contre lui.

Tshisekedi tient Bemba et Kamerhe au cou

Le message de Bussa tencant Bemba sur sa Congolité est un véritable ballon d’essai, mais aussi une mise en garde. Le geste n’est pas anodin. Pour les analystes politiques, il relève d’une stratégie d’anéantissement des candidats. On peut beau dire qu’il est Congolais, mais Bussa, membre du gouvernement de surcroît, ancien du Mlc, cadre de l’Union sacrée comme Bemba, lancer un tel missile est une indication. Qui dit que les autres roitelets politiques de l’Équateur qui ne supportent pas l’hégémonie de Bemba, ne vont pas emboîter le pas au leader de CEDR pour le titiller. Ajouter à cela, Fatshi va couper tous les robinets. Aucun rond ne tombera dans l’escarcelle de Bemba. Les dommages et intérêts obtenus lors de parodies de procès ne sont jusque-là que payés progressivement, analyse un politologue. La moindre rébellion à l’égard du chef sera synonyme de fermeture de vannes.

Kamerhe voit aussi l’épée suspendue sur sa tête. S’il bouge, les autres formats du procès 100 jours vont naître. “Les matières sont là et il le sait”, a rappelé à Ouragan.cd, une source bien introduite. Comme Bemba, Tshisekedi garantit les intérêts de Kamerhe. Il a refusé qu’on saisisse les biens immobiliers de son ancien dircab qu’il aurait attribués, selon un cadre Udps, a des prête-noms. Bref, Bemba et Kamerhe sont prévenus. Ils sont obligés de s’aligner sinon le pire est à craindre surtout que chacun d’eux espère être le dauphin en 2028.

Kokolo Jean
Ouragan

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