À quelques heures de l’arrivée du président français à Kinshasa, les esprits s’échauffent et la capitale congolaise est en ébullition pour passer le message du désaveu national face à la France accusée de soutenir le Rwanda dans la guerre criminelle du M23. Mouvements citoyens, partis politiques et organisations de la société civile se grouillent pour arborer des messages vifs à l’égard du chef de l’État français.

“Macron égale M23”, peut-on lire en grand caractère sur le mur de l’ambassade de France à Kinshasa. Des militants pro-démocratie ont usé de leur liberté pour marquer leur condamnation farouche de l’attitude de la République française face aux crimes de guerre, crimes contre l’humanité et crimes de génocide commis en République démocratique du Congo. Des annonces audios et vidéos se multiplient, des messages ainsi que des contacts de bouche à oreille s’intensifient. La visite macroniènne est placée sous le signe d’un refus global de la guerre, de l’insécurité et de la souffrance.

Colère dans les rues de Kinshasa

Un conducteur révolté par la situation de guerre persistante dans l’est de la RDC pique une vive colère et demande aux habitants des quartiers surnommés “la Chine populaire” (Tshangu) de se mobiliser le long de l’artère principale de la route de l’aéroport afin d’exprimer leur ras-le-bol à Emmanuel Macron. Pour lui, l’arrivée du président français n’augure rien de victoire diplomatique, mais plutôt d’une tournée longtemps planifiée du président français pour les intérêts de son pays. “Car si nous demandons aujourd’hui à la France de nous vendre des armes de dernière génération telles que des canons Caesars qu’ils viennent de livrer aux Ukrainiens, vont-ils nous le permettre, non. Le président Fatshi leur a demandé des armes, la France et la Belgique ont rejeté notre demande”, a-t-il commenté dans une vidéo en circulation sur les réseaux sociaux. “Ils n’ont pas besoin de nous, mais de nos richesses”, a-t-il poursuivi, indiquant que lui-même, Macron reconnaît que l’Afrique est un terrain de grande compétition des puissances. “Nous devons nous révolter”, a-t-il invité. Nicole Kavira du mouvement des indignés qui était en sit-in devant l’ambassade de France à Kinshasa tranche sur Twitter que “Macron égale Kagame”, désignant les deux chefs d’État comme les auteurs du génocide des Congolais. Le sit-in organisé le mercredi 1er mars devant l’ambassade de France à Kinshasa par la Dynamique des mouvements citoyens et les indignés de la République démocratique du Congo était un message clair des Congolais adressé à Paris.

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Ça suffit, concentrons-nous à la guerre

C’est le même conducteur kinois qui tire la sonnette d’alarme et attire l’attention du président de la République sur l’urgence de se concentrer dorénavant à la défense de l’intégrité territoriale de la République démocratique du Congo. Dans un message très personnel à Félix Tshisekedi, il l’exhorte à plus d’efforts internes pour la résistance. “Cher président Fatshi, il est temps de laisser les discours de gauche à droite, vous avez suffisamment démontré votre bonne foi partout au monde. Il est maintenant temps de nous organiser pour la guerre. Vous êtes passé à l’ONU, à l’Union africaine et partout. Vous avez suffisamment montré notre bonne foi”, a-t-il martelé.

De son côté, Gabriel Mokia, le président du Mouvement des démocrates congolais (Mdco) ne se laisse pas impressionner par le décor protocolaire lié à l’arrivée d’Emmanuel Macron. Il dénonce les attaches très prononcées entre les deux dirigeants (Paul Kagame et Emmanuel Macron) et met en garde contre toute tentative de balkanisation de la RDC. “Macron est avec le Rwanda. Nous suivrons son discours ici à Kinshasa très attentivement. Le changement qu’il prône doit être vécu sur le terrain. Bunagana, Kiwanja, Rutshuru doivent être libérés”, a-t-il insisté au cours d’une interview sur Télé 50 mercredi soir. M. Mokia dénonce également la mauvaise foi des animateurs des institutions de la République, notamment les membres du gouvernement pour leur indifférence face à certaines priorités nationales.

Reporter les élections, priorité à la guerre

“On nous a insulté pendant des années et des années”, rappelle le conducteur kinois écœuré par les humiliations successivement subies du Rwanda, des multinationales et de la communauté internationale. Pour ce Congolais, Félix Tshisekedi et le gouvernement congolais doivent accorder priorité à la résolution de la crise sécuritaire avant d’envisager une nouvelle planification des élections. “Que les élections s’organisent après le rétablissement de la paix”, a-t-il plaidé.

Kokolo Jean
Ouragan

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