“Je n’ai ni un mandat ni l’intention de me mêler d’une décision qui ne peut appartenir qu’aux parties prenantes en ce qui concerne le processus électoral”, a affirmé Mme Leila Zerrougui, représentante spéciale du secrétaire général des Nations unies en RDC au cours d’une conférence de presse tenue ce mardi 16 octobre à Kinshasa.

En une heure, la cheffe de la Mission de l’ONU pour la stabilisation en RDC (MONUSCO) a répondu à plusieurs questions des journalistes sur des sujets concernant la mission onusienne.

“Moi je travaille sur un agenda très clair. Le président de la République a été très clair avec le Conseil de sécurité : les élections auront lieu le 23 décembre. C’est dans ce contexte que je m’inscris et j’essaie d’aider les différentes parties à lever les divergences. Il ne suffit pas d’aller aux élections. C’est d’aller aux élections apaisées, des élections où chacun se reconnait […] Ce que nous voulons, c’est de permettre à la RDC d’avancer dans ce processus, d’aller vers plus de stabilité, de se concentrer sur son développement”, a souligné Mme Zerrougui.

Les autorités congolaises ont pourtant officiellement renoncé à l’appui logistique de la MONUSCO et au financement des élections par ses partenaires extérieurs. La MONUSCO reste tout de même prête pour agir.

« Je me prépare pour le cas où on a besoin de l’appui logistique. Nous avons pris ce risque financier. Si on nous dit à temps qu’on a besoin de l’appui dans le déploiement du matériel, nous sommes prêts à le faire », a précisé Mme Zerrougui chargée de mettre en œuvre le mandat de la MONUSCO qui prévoit un appui logistique aux élections.

Mais qu’arrivera-t-il le 23 décembre 2018 s’il n’y a pas élections en RDC ?

« Si le 23 décembre il n’y a pas élection, j’espère que les parties prenantes se seraient déjà entendues sur le pourquoi et ce qu’il faut faire à la place. C’est ça le plus important. C’est pourquoi il faut que les gens se parlent, se mettent d’accord, se disent un minimum de vérité. Et qu’ils avancent », dit Mme Zerrougui. « C’est pourquoi je parle de minimum de consensus parce qu’on ne peut pas être à 100% d’accord quand on est adversaires politiques. Ce que nous voulons, c’est qu’ils s’entendent sur le minimum qui permet à ce que ces élections soient crédibles et se déroulent sans contestation majeure », a-t-elle insisté.

Ebola ; les ADF

La représentante spéciale du secrétaire général de l’ONU a aussi manifesté sa compassion pour les populations de Beni. La maladie à virus Ebola avec son lot de contraintes vient compliquer la mission des forces de sécurité dans la traque des groupes armés.

« La situation d’Ebola est quelque chose qui s’ajoute aux stress et difficultés de la population de Beni. Et j’espère que nous pourrons ensemble arriver à ce que ces souffrances cessent. La population de Beni a le droit de vivre comme toutes les populations du monde dans la paix, la sérénité, la stabilité, se tourner vers la construction du pays, des institutions, la construction du futur et de celui de leurs enfants”, a déclaré Mme Zerrougui.

Elle déplore et relève aussi le changement des stratégies des ADF.

“Nous sommes préoccupés parce que les ADF prennent une posture plus agressive, s’approchent de la ville, ciblent les FARDC, la MONUSCO, sans compter toute la souffrance et toutes les violences que subit la population. C’est pour cela que nous affirmons que pour nous, Ebola est une contrainte, une difficulté. Parce qu’on ne peut pas à la fois dans une zone affectée par Ebola, mener des opérations qui peuvent déstabiliser les populations. Nous travaillons pour protéger la ville de Beni. En notre priorité aujourd’hui c’est de contenir l’Ebola dans Beni”, a indiqué Mme Zerrougui.

« Ne pas exclure d’autres options face aux ADF »

Ces dernières semaines, les ADF ont multiplié les attaques à Beni contre les civils et les forces loyalistes. Face à ce groupe armé étranger présent sur le sol congolais depuis des décennies, la cheffe de la MONUSCO estime qu’il faut plusieurs options pour mettre un terme son activisme.

“Nous avons une stratégie qu’on a développé pour travailler sur la problématique des ADF. Personnellement, je ne crois pas qu’un groupe qui est dans ce pays depuis les années 80, on peut le vaincre uniquement par les armes. Il ne faut pas exclure toutes les options qui peuvent mettre de la pression sur un groupe armé pour déposer les armes. Cela ne signifie pas qu’il faut légitimer l’action ou encourager des négociations politiques avec des ADF. Les ADF ne sont pas des Congolais. C’est un groupe armé étranger ; il ne peut pas revendiquer des droits politiques en RDC”, a précisé la patronne de la MONUSCO.

La Représentante spéciale du secrétaire général de l’ONU a tenu à souligner la complexité même du groupe armé ADF qui rend difficile la lutte engagée contre lui.

“Faire la guerre à un groupe qui est dans la brousse et qui sort au moment où vous vous attendez le moins, ce n’est pas facile […] Il y a une difficulté réelle. Les ADF ont pour technique par exemple d’opérer avec les femmes et les enfants. C’est très difficile de faire face à ce genre de technique. Nous travaillons mais ce n’est pas facile. Vous avez par exemple des populations qui ont marié leurs filles à ces gens-là. Il faut avoir l’information qui permet d’être opérationnel et efficace. […] Il y a beaucoup de difficultés : Ebola, les groupes armés. Il y a des intérêts économiques qui échappent au contrôle de l’Etat. Mais nous ne renonçons pas”, explique Mme Zerrougui.

Situation des refoulés basés à Kamako

Concernant les 180 000 Congolais qui ont été refoulés de l’Angola ces derniers jours, la cheffe de la MONUSCO indique qu’une équipe est déjà sur place, mais éprouve des difficultés.

“On a envoyé une équipe de droits de l’homme, on a nos militaires qui se sont déployés et une équipe d’humanitaires qui est partie là-bas. Les humanitaires ont un grand défi parce qu’ils n’ont pas beaucoup d’argent. C’est quelque chose qui s’ajoute à tout ce que nous sommes en train de vivre. C’est d’autant plus préoccupant qu’une fois qu’ils traversent et ils sont parfois dans des zones où opèrent certains groupes armés”, note Leila Zerrougui.

Radio Okapi /MCP

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