Le 15 mai dernier, il a été annoncé à l’Assemblée nationale qu’une pétition visant à la destitution de Jean-Marc Kabund a Kabund, premier vice-président de cette chambre, serait examinée. Est-ce le début d’une offensive des kabilistes pour rompre l’alliance avec l’UDPS et l’UNC? Avec quel objectif? L’UDPS fragilisée, a également beaucoup à y perdre.

Le député MLC (Mouvement de libération du Congo, de Jean-Pierre Bemba) Jean-Jacques Mamba a lancé une pétition pour demander la destitution du premier vice-président de l’Assemblée nationale, au motif qu’il aurait nui à l’image de celle-ci en assurant sur Radio Top Congo que convoquer un congrès pour avaliser l’état d’urgence sanitaire face au coronavirus coûterait « 7 millions de dollars », un chiffre faux. Pour des raisons non éclaircies, Kabund cherchait à éviter la réunion des parlementaires, bien que la Constitution les oblige à ratifier l’état d’urgence. Les parlementaires se sont quand même réunis et ont adopté le texte.

La pétition a recueilli 62 signatures sur les 500 députés (50 noms suffisaient pour qu’elle soit prise en considération), dont 57 issues de la coalition kabiliste FCC (Front commun pour le Congo), ce qui pousse l’UDPS – le parti de Kabund a Kabund et du président Félix Tshisekedi – à dénoncer un « coup » des kabilistes.

Signature fausse ou irréfléchie?

Alors que, le 16 mai, depuis sa prison, Vital Kamerhe – directeur de cabinet de Félix Tshisekedi accusé de malversations et son principal allié – appelle les députés de son UNC (Union pour la Nation congolaise) à ne pas soutenir la pétition, un député UNC, Simon Mpiana Tumba, porte plainte contre l’initiateur de la pétition pour « faux et usage de faux ». Selon Mpiana Tumba, sa signature au bas du texte a été imitée. Jean-Jacques Mamba se défend en assurant que Mpiana a signé devant témoins avant de revenir deux jours plus tard prier qu’on retire son nom – en vain. Et d’ajouter qu’il n’y a aucune raison de faire un faux pour une seule signature, quand on en a déjà plus qu’à suffisance.

Kabund, lui, se prévaut de la plainte UNC pour dénoncer la présidente kabiliste de l’Assemblée, Jeanine Mabunda, l’accusant de partialité à son encontre pour avoir annoncé l’examen de la pétition malgré l’accusation de faux. La pétition est en ce moment examinée en commission.

On voit mal, cependant, l’intérêt des kabilistes à briser la coalition frauduleuse qui les a maintenus au pouvoir (toutes les assemblées; une partie du gouvernement). Aussi pense-t-on qu’il s’agit plutôt de faire pression sur le président Tshisekedi, lancé depuis des semaines dans une opération de « nettoyage » des cas les plus flagrants de corruption, afin de lui rappeler l’état des forces en présence.

L’étau se resserre sur Kabund

Alors que circulent dans tout le pays des listes de collaborateurs du chef de l’Etat pratiquement exclusivement de son ethnie, les Lubas du Kasaï, le camp tshisekediste est aussi affaibli par des divisions internes. Le 13 mai, le ministère de l’Intérieur a donné un avis favorable à une plainte contre Kabund a Kabund – encore lui! – venue de l’intérieur de l’UDPS et plus précisément de Victor Wakwenda, président de la Convention démocratique du parti.

Dans l’euphorie de son partage du pouvoir avec Kabila au mépris des résultats électoraux (jamais publiés intégralement), Félix Tshisekedi, à qui la Constitution interdit d’être à la fois chef de l’Etat et chef d’un parti, avait nommé unilatéralement, le 22 janvier 2019, Kabund a Kabund président ad interim de l’UDPS, au mépris des statuts du parti. Cette nomination est considérée comme illégale par les cours et tribunaux congolais, qui ont rejeté tous les mandats signés par Jean-Marc Kabund pour « défaut de qualité du signataire ». Mais celui-ci n’a pas voulu se retirer, bien que cette direction « intérimaire » non statutaire ait provoqué plusieurs embrasements et une scission grandissante au sein de l’UDPS.

Les délices du pouvoir

Les légalistes appellent au retour aux statuts, dont l’article 26 prévoit que quand le président du parti est empêché, un triumvirat composé du président en exercice de trois de ses organes – dont la Convention démocratique – assure l’interim pour 30 jours, au terme desquels il convoque un congrès en vue d’élire un nouveau président du parti. C’est à cette tendance légaliste que le secrétaire général du ministère de l’Intérieur – dont le ministre, Gilbert Kankonde, est UDPS – vient de donner un avis favorable, le 13 mai dernier. Selon cet avis, un directoire doit être installé à la tête de l’UDPS et un congrès organisé.

« Colère de Kabund, qui, dans une lettre du 20 mai, menace implicitement le secrétaire général du ministère de l’Intérieur de poursuites s’il ne « retire » pas sa lettre, au motif que les « personnalités habilitées à engager notre parti » – soit sa tendance, jugée illégale par une partie de la formation politique – ne lui ont pas demandé de se mêler du conflit interne.
Attaqué de l’extérieur et de l’intérieur, Kabund a Kabund est aussi rendu responsable, par les jeunes de l’UDPS, de la confiscation des délices du pouvoir, avec quelques centaines de personnes autour de Félix Tshisekedi, au détriment de la masse des militants, pour qui l’alternance à la Présidence n’a rien changé.

La libre Afrique

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