Même s’ils ont décidé de toujours sourire en public pour montrer qu’ils marchent ensemble au sein de la coalition au pouvoir, le président de la République et son prédécesseur sont sur le qui-vive. Mais les deux « autorités morales » du FCC et CACH n’en sont pas encore arrivés à se donner des coups fatals. Pour l’instant, la guerre n’est que psychologique, chacun attendant le moment venu pour prendre sa revanche sur l’autre. Les exemples sont légion, illustrant la rancœur qui les habite sous le couvert de la prudence, même si, pour sauver les apparences, Tshisekedi et Kabila font semblant de se concerter de temps en temps.

Va-t-on droit vers le précipice ? Chaque jour qui passe, le fossé ne cesse de s’agrandir entre les deux plus importantes plateformes politiques au pouvoir, le Front commun pour le Congo (FCC) cher à Joseph Kabila et le Cap pour le changement (CACH) de Félix Tshisekedi.

La liste non exhaustive de différents bras de fer entre les deux camps illustre la tension permanente qui traduit le manque de sincérité, de courage et de vérité dans ce mariage atypique : Congrès avorté de Thambwe Mwamba et Mabunda pour corriger les actes pris par le chef de l’État, notamment la proclamation de l’état d’urgence sanitaire à la suite de la pandémie de la Covid-19 ; déchéance à la va-vite de Jean-Marc Kabund du bureau de l’Assemblée nationale ; intervention de la justice et blocage des issues du Palais du peuple ; interpellation du ministre de la Justice, Tunda ya Kasende, puis sa démission ; polémique autour des nominations à la magistrature et dans l’armée, … Et, finalement, c’est une affaire « floue » de milices démantelées à Kinshasa, au quartier Kingabwa, dans la commune de Limete, qui exacerbe l’inimitié entre les deux camps de la coalition au pouvoir.

À suivre de près les faits et gestes des caciques dans les rangs du FCC de Joseph Kabila, tout est clair. Il existe un projet d’éviction de l’actuel chef de l’État de son fauteuil présidentiel. Comment et quand ? C’est un agenda qui est étoffé au jour le jour.

Des cadres de l’ancien régime dont l’État de droit de Félix Tshisekedi n’enchante pas, en tout cas pas du tout, à cause de leur passé très chargé de dossiers que veut déterrer ce fameux État de droit, ne réfléchissent pas deux fois pour devancer les événements. La principale stratégie est celle de tout étouffer, en présentant de faux dossiers pour détourner l’attention de l’opinion.

État de droit, cette épine qui dérange

C’est dans ce lot que l’on note l’affaire de la « milice de Kingabwa » qui a du coup fait réagir Néhémie Mwilanya et son équipe stratégique. L’attribution de cette milice au parti présidentiel n’a fait qu’étaler au grand jour les maladresses dans le ficelage d’un plan qui vise à salir un parti adverse. C’est là qu’il faut voir que derrière le démantèlement de cette surprenante milice, il y a toute une intelligence politique visant à noyer un parti qui gêne par son fameux État de droit.

En réalité, le démantèlement de cette milice de Kingabwa a pour cible Félix Tshisekedi. Sinon pourquoi n’y a-t-il pas eu la même surenchère dans l’ex-Katanga, après que Gédéon Kyungu a disparu dans la nature dans des circonstances obscures et sans compter le fait que les milices Bakata-Katanga représentent encore une menace sécuritaire ?

Quid de la responsabilité de graves massacres commis dans le Kasaï à la suite du phénomène Kamuina Nsapu ? Quid des massacres de Yumbi, dans l’ex-Grand Bandundu ? Quid des massacres des adeptes de Bundu dia Kongo ? Quid des massacres à répétition dans la partie Est du pays ? Pourtant, pour tous ces dossiers, des rapports accablants existent, notamment ceux des Nations unies…

Voilà autant de questions sécuritaires sérieuses auxquelles il faut répondre et éclairer, une fois pour toutes, au nom de l’état de droit. Curieusement, ces questions n’avaient jamais fait l’objet de communiqués politiques ! D’ailleurs, même la télévision nationale ne pouvait pas les relayer.

Se cacher et jouer à la diversion

Non, il faut contourner et cacher des cadavres dans des placards par la distraction de l’opinion. Pour ce faire, des sujets sont inventés et bien pensés : mauvaise gestion des fonds à la présidence de la République, etc. Dans le fond, c’est l’état de droit qui donne des insomnies. D’où l’invention des contrevérités, l’attisation de la flamme tribale, le récit des tares d’un président de la République traité de tous les mots, via les médias et les réseaux sociaux, une véritable guerre psychologique…

Mais comme dans un jeu d’échecs, il n’est pas évident que les positions initiales déterminent la fin de la partie. Le président de la République ne sera pas, sans doute, un simple agneau devant être conduit à l’abattoir. Il dispose toujours d’une marge politique de manœuvre incomparable. Il faut ainsi redouter sa douceur.

Encore qu’il y a peu, il a imprimé ses marques par le contrôle de quelques secteurs-clés de la vie nationale (justice, armée). Un coup de poing donné en pleine lucarne du FCC. C’est pour dire que le coup fatal peut venir de n’importe quel camp. Qui perdra ? Personne ne peut prédire d’avance. Une chose est sûre, c’est le peuple qui perd, en vivant le statu quo dans son quotidien.

Entretemps, le parti présidentiel, loin de démontrer les stratégies contraires, reste sur la défensive face à des accusations qui se multiplient. C’est une destruction silencieuse de l’image du parti pacifique de feu Étienne Tshisekedi.

Le Potentiel

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