Une délégation de la Conférence épiscopale nationale congolaise (CENCO) était à Bruxelles, jeudi, avant de se rendre au Canada, pour demander un appui diplomatique, en expertise et financier afin de pousser le régime du président congolais Joseph Kabila à organiser des élections régulières et transparentes.

La délégation, conduite par le président et le vice-président de la Cenco, Mgrs Marcel Utembi et Fridolin Ambongo, a été reçue par le ministre belge de la Coopération, Alexander De Croo, et par le département chargé des relations extérieures à l’Union européenne. Questionné par la presse belge – « La Belgique en fait-elle suffisamment selon la Cenco ? » – le porte-parole des évêques congolais a répondu par une boutade : « Oui, mais si elle en faisait plus, ce ne serait pas de trop ».

Lors d’une conférence de presse à laquelle La Libre Afrique.be a assisté, le porte-parole de la Cenco, l’abbé Donatien Nshole, a dit l’espérance que la suspension des marches pacifiques de chrétiens par ses organisateurs, le Comité laïc de coordination (CLC), sera mise à profit par tous “pour donner au peuple les conditions pour l’organisation de bonnes élections”. “Nous voulons que ces élections mettent fin à la crise. Il y a un risque que ce ne soit pas le cas”, a indiqué l’abbé.

La Cenco veut des garanties

Ce dernier s’est félicité de voir que “l’opposition commence à s’organiser, ça nous rassure”. Si elle ne parvient pas à cacher sa hâte de refiler aux politiques le fardeau de la lutte pour l’Etat de droit, la Cenco compte cependant continuer à accompagner celle-ci.

Elle a bien enregistré les “discours rassurants [du pouvoir] sur l’organisation des élections” mais veut des “garanties pour rassurer la population sur le fait qu’elles auront bien lieu” : un plan de décaissement des fonds de la Ceni (Commission électorale nationale indépendante) ; une expertise nationale et internationale de la “machine à voter” parce que, “s’il n’y a pas la confiance” dans cet outil, il y a risque de contestation des résultats” ; le dépôt d’une candidature à la présidentielle pour le camp kabiliste (“on aura alors la garantie que Joseh Kabila accepte de partir”).

Respecter des dates-clés

La délégation a également expliqué que la Cenco resterait attentive à ce qui sera décidé lors de quelques dates importantes du calendrier électoral pour juger de la bonne foi de la marche vers des élections. Ainsi, a expliqué le père Clément Makiobo, le 26 mars au plus tard, le ministre de l’Intérieur doit publier les noms des partis agréés ; « on verra alors si a été réglé le problème des partis doublons » (allusion à la reconnaissance, par le régime, de dissidences à sa solde de partis d’opposition, sous le nom de leur parti d’origine), « ce qui est un préalable pour avoir des életions crédibles ».

Autre date-clé : c’est le 6 avril au plus tard que doit être votée la loi sur la répartition des sièges, indispensable aux scrutins. Cette loi aurait dû être votée à la session parlementaire qui a pris fin en décembre 2017, mais le régime avait plus pressé à faire : faire voter une nouvelle mouture de la loi électorale (non annoncée et non nécessaire pour aller aux élections) donnant un avantage exorbitant au parti présidentiel, le PPRD.

Enfin, à partir du 23 juin auront lieu les dépôts de candidature et l’on verra si la Majorité présidentielle présente ou non un candidat à la Présidence, donc si Kabila a, ou non, l’intention de quitter le pouvoir, après deux ans de refus de le faire.

“La Cenco va évaluer si elle a la conviction qu’il n’y aura pas d’élections. Elle se réunira à ce sujet en juillet”, a dit l’abbé Nshole.

60.000 observateurs de l’église

Enfin, le père Makiobo a précisé que l’église compte former 60.000 observateurs électoraux et compte sur l’aide du Canada pour y arriver. « Une partie l’a déjà été et est sur le terrain, observant si les conditions de bonnes élections sont réunies ». Ces observateurs pourront couvrir les deux tiers des 90.000 bureaux de vote annoncés, une proportion suffisante « pour se prononcer sur la crédibilité des scrutins », a-t-il indiqué. L’église avait déployé 10.000 observateurs pour 63.000 bureaux de vote en 2011, élections marquées par des fraudes massives et jugées « non crédibles » par les observateurs nationaux et internationaux – ce qui n’avait pas empêché les kabilistes de rester au pouvoir.

Alors que les partis politiques semblent n’avoir encore rien fait pour préparer leurs témoins à envoyer dans les bureaux de vote, le père Makiobo a regretté que, tandis que la Majorité présidentielle se prépare aux scrutins, « les partis d’opposition se battent encore pour un positionnement » et tentent de « se servir du CLC comme tremplin ; le CLC ne peut pas jouer le rôle de l’opposition ».

La Libre / MCN

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